De "la très haute technicité des forgerons" au Moy

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Modérateur : L'équipe des gentils modos

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vuillem
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ven. sept. 15, 2006 6:50 am

medieviste a dit :

Je parle des objets que j'ai pu voir : exemple au Musée du château de Castelnaud en Dordogne, on y voit (ou voyait, je ne sais plus si ce sont les pièces encore ne place ou celles reprises par le proprio de la fameuse collection privée) des éléments d'armure, mais surtout de casques avec les fissures caractéristiques de soudures qui cèdent sur quelques cm de long.
Au musée d'Unterlinden à Colmar on y voit également une série d'armures XVIe et début XVIIe à couches d'acier visibles (il suffit d'avoir l'oeil un peu exercé)
Au château du Haut-Koenigsbourg quelques armures visibles (mais de derrière les barrières sauf si on accepte de déclencher les systèmes d'alarme) du XVIIe siècle, mais aussi un superbe armet du XVIe en réserve.
Enfin deux casques : l'un à Zurich, chapel de fer du XVe siècle, gravé à l'eau forte dont un morceau manque, cassé comme du cristal tant l'acier était dur, et le second un bassinet début XIVe au musée d'armes de Liège, qui présente lui aussi les couches visibles notamment vers le bas du casque, et j'ai pu respectivement étudier ce dernier en mains propres (et tremblantes vu la rareté de l'objet)
Oui mais non... L'aspect de surface que tu décris ressemble très fortement a celui que prend un acier corroyé. Ce corroyage est nécessaire sur du métal de bas-fourneau aussi bien que sur celui des premières production de haut-fourneau. Hors ce qui donne l'aspect "damas" n'est pas lié à une volonté du forgeron de souder plusieurs feuilles d'acier de différentes teneurs entre elles, mais est la conséquence de l'hétérogénéité du métal produit avec les techniques anciennes. Le seul moyen de prouver ce que tu avances, serait de faire des métallographies dans la masse à plusieurs endroits d'un même casque pour vérifier que le faciès "en feuille" apparaisse systématiquement et de manière régulière. Donc il n'est pas possible d'affirmer ce que tu dis avec juste une observation de surface.
Le monde est déjà saturé de passé, à tel point que le présent peut à peine y trouver ça place (L. Olivier/Le sombre abîme du temps)
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vuillem
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ven. sept. 15, 2006 7:06 am

Oriabel a dit :

Arghhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhhh !
c'est quoi un jazeran dans ce contexte...ça m'intéresse bougrement !!!!!
Je ne sais pas. A toi de chercher. Regarde dans le dictionnaire de Godefroy, peut-être que tu auras ta réponse.
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michel de waulsort
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ven. sept. 15, 2006 8:46 am

Oriabel a dit : Arghhhhh ! c'est quoi un jazeran dans ce contexte...ça m'intéresse bougrement !!!!!
Dans mon dictionnaire de vieux français :
Jaseran, Jazerenc, Jacerant :
Adjectif signifiant "de mailles" : "Gentix hom sire, je te pri et comant, que li ostez son jauber jazerant" (Raoul de Cambrai 145?)
2° Substantif : Cotte de mailles pour l'homme et le cheval : "Dont chascun et cheval couvert de jazerant" (cuvelier) - "Fery icelui sarrasin tellement qu'il lui perça escu et jaseren" (Hist. de Bertrand duguesclin par Ménard, p358)
3° Collier, chaîne d'anneaux : "Juno m'a donné charge pour lui apporter quelque dorure, jaseran ou ceinture à la nouvelle façon" (Cymbalum Mundi p62) - "Les patenostres anneaulx, jazerans, estoient de fines pierreries, escarboucles, rubis" (Rabel.T1,p324)

Ce sens est corroboré par le dictionnaire de vieil anglais
"A CONCISE DICTIONARY OF MIDDLE ENGLISH FROM A.D. 1150 TO 1580"
que l'on peut trouver sur http://www.pbm.com/~lindahl/concise/concise.html

Iesseraunt, sb. a coat or cuirass of fine mail, HD; gesserant, S3; gesseron, S3.--OF. jazerant (Ducange), jazeran, iaseran (Cotg.), jazerenc (Roland); cp. It. ghiazzerino (Florio).
le nocturne
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lun. sept. 18, 2006 5:04 am

acier doux ou acier trempes? tel est la question.maintenant avec ce que j'ai vu et tester je peux vous dire qu'apres des combats avec un heaume 13 s en acier doux (ep tole 1,5)il faut de temps en temps debosseler mais les fosses du heaumes ne mettes pas en danger le combattant.tandis qu'avec un casque americain transformer en heaumes le casques en lui meme ne subit aucune defformation.maintenant il faut etre sur de sa trempe car je prefere un petit entretien de temps a autres plutot que la rupture du casque en cas de choc.a vous de choisir.
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medieviste
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ven. sept. 22, 2006 5:11 pm

vuillem a dit :
Le seul moyen de prouver ce que tu avances, serait de faire des métallographies dans la masse à plusieurs endroits d'un même casque pour vérifier que le faciès "en feuille" apparaisse systématiquement et de manière régulière. Donc il n'est pas possible d'affirmer ce que tu dis avec juste une observation de surface.
Ben il se trouve que je suis repassé il y a quelques jours à peine au château de Castelnaud, en Dordogne, et j'ai vu les pièces d'armures du musée : sur plusieurs pièces (la majorité même) on voit clairement des couches manquantes, il s'agit indubitablement d'acier feuilleté.
Ce n'est pas une nervure dans l'acier, ni un dessin, mais bel et bien une couche qui a sauté, une couche comme si on enlève une couche de corne sur une cuillère en corne par exemple. Sauf que c'est de l'acier dont on parle.

Ceux qui ne le croient pas sont libres d'aller le vérifier de leurs yeux, c'est dans la salle des armures de l'étage (pas celle du bas où il y a une mauvaise vidéo présentant assez mal la guerre "médiévales") : sur la salade XVe, sur un plastron XVe, sur un bassinet XIVe et sur quasiment toutes les autres armures de la salle. Mais c'est ces pièces-là qui m'ont le plus marqué.

Reinhardt
Reinhardt von Rappolstein
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vuillem
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sam. sept. 23, 2006 4:23 am

La desciption que tu fais là n'enlève rien au fait que cela peut simplement être le fait de la métallurgie direct. L'hétérogénéité du métal de bas-fourneau (et des premiers hauts-fourneaux) peut être tout à fait responsable de cet aspect feuilleté. Les écailles qui dégagent sont probablement des zones de soudures (qui sont faites lors de l'épuration et du corroayage) dans laquelle la corrosion s'est insinuée. Je continue à penser que cette descrïption ne suffit pas pour conclure, cet organisation du métal peut très bien ne pas être voulu par l'armurier.
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medieviste
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sam. sept. 23, 2006 5:18 am

Ben je veux bien mais il est tout aussi hasardeux de conclure ça alors qu'on voit ces morceaux de couches qui ont sauté sur presque toutes les pièces d'armement défensif !
Ces couches sont visibles sur des casques ou des plastrons majoritairement, donc des pièces réalisées avec grand soin par les armuriers car la vie de son porteur en dépendra.
Or on ne voit pratiquement jamais ces couches sur d'autres pièces de tôle fine archéologiques.

On sait le travail énorme que fait un forgeron sur une lame d'épée, et on sait la valeur monétaire de cette dernière. Idem pour les casques ou armures (qui valent même encore plus cher que les épées)...
Reinhardt von Rappolstein
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vuillem
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sam. sept. 23, 2006 5:59 am

C'est bien pour ça qu'on ne peut pas conclure et que je dis que sans analyse on ne pourra pas aller plus loin. Il existe quand même quelques publications concernant la métallographie de l'armement défensif (cf, a. Williams) et il ne conclue jamais à un acier feuilleté que ce soit pour des défenses de têtes ou d'autres défenses corporelles, pourtant il a analysé plus de 300 pièces.
Quant à l'hétérogénéité du métal ancien, elle a été démontré dans de nombreux travaux.

Toutes les armures ne sont pas faites avec le plus grand soin (cf la démonstration de A. Williams sur ce qu'il appelle les "armures munitions"). Et il ne faut pas oublier les contextes de conservation. Les armures les mieux conservées ne sont pas forcément celles qui ont le plus servies. Il est même souvent probable pour des périodes comme le XIVeme et le XV que certaines soient des armures d'apparat n'ayant pas été conçues avec le même soin que des armures qui ont réellement servies à la guerre.

Enfin, en ce qui concernce c'est écailles qui sont décollées, le phénome pourrait même être lié à la fabrication en elle-même. Régis Aranda qui fait du métal de bas-fourneau a fait des essais avec Pascal Renoux et ils se sont rendus compte qu'ils perdaient des écailles lors de la mise en forme de la tôle. Cela s'explique assez bien par des soudures qui ne sont pas bien faites dans la tôle ou des inclusions non métallique un peu trop envahissantes.

En tout cas, reste à compléter l'étude avec les bons moyens d'analyse. Je suis d'accord avec toi, il me semble qu'il est nécessaire de prendre des précautions avant d'affirmer une conclusion ou une autre.
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beraud de mercoeur
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dim. sept. 24, 2006 3:24 pm

On sait que l'armure de plates se généralise en même temps que ce développe la production d'acier de haut fourneaux, appelé pour cetaines catégories, acier marchand.
Ces aciers étaient-ils de meilleurs qualité que ceux produit précédemment en bas fourneaux ? Ou seulement un produit fabriqué à moindre frais et qui permettait donc de fabriquer plus de plates et aussi toutes autres sortes d'objets ferreux ?

Tout ce qui est dit précédemment est fort judicieux, mais fait référence au bas moyen âge. D'où la nécessité de bien signaler la différence entre les époques. Pourquoi le corroyage des lames d'épées par exemple disparait-il progressivement en même temps qu'évolent la fabrication de l'acier ? Ces épées obtenues à partir des aciers de haut fourneaux sont-elle de meilleures qualité que les plus anciennes ?
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vuillem
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dim. sept. 24, 2006 4:40 pm

L'hypothèse du lien entre haut-fourneau et l'armure ne me semble pas forcément évident. D'abord, parce qu'il faut attendre les année s 1450 en France pour voir apparaître les premiers fourneau de ce type. Ils apparaissent bien à la fin du XIIIeme siècle/début XIVeme en Allemagne. Mais c'est loi d'être la seule zone de production d'armure de plates à la fin du XIVeme siècle. Les spécialistes me corrigeront, mais ils me semblent que les premières armures consitutées de tôle de grandes tailles apapraissent dans les années 1360/1370.
Dans la chaîne opératoire, le procédé indirect fourni en réalité une masse de métal aussi hétérogène et plein d'impuretés que dans le bas-fourneau à ces périodes là. Rien, ne permet donc de dire si un des deux procédés fourni des acier en plus grandes quantités et/ou de meilleur qualité.
Apparemment, à son apparition, le procédé en haut-fourneau, mal maîtrisé, n'est pas rentable. Le métal qui en sort n'est pas si bon marché que ça.

En ce qui concerne les épées, je pense qu'il y a confusion. Le corroyage ne disparaît pas, il est systématiquement nécessaire das la chaîne opératoire du bas-fourneau et du haut-fourneau jusqu'à l'invention d'autres méthodes d'affinage de la fonte à la période moderne. Je pense que tu fais référence aux épées damassées du Haut-Moyen-Age. C'est plutôt la technique du damas qui va effectivement être abandonnée.
Même réponse, il me semble que les épées de conception plus simple, sans damas, sont connues depuis le Xeme ou le XIeme siècle. Et là pour le coup, pas de Haut-Fourneau connu dans nos régions à cette époque là.

Pour info, il n'est pas évident de déterminer la différence entre métal de bas-fourneau et de haut-fourneau. Même une observation au microscope ne le permet pas. c'est par une étude des inclusions non métalliques qu'on peut faire cette différence, et ce depuis seulement une dizaine d'années.

edit: Tiens, j'ai oublié ça: L'innovation technique qui pourrait avoir une influence importante sur la production de tôle et donc d'armure et le développement du martinet hydraulique. Cela reste une hypothèse (il faut donc la confirmer ou l'infirmer): il est possible que le développement important du martinet hydraulique dans le courant des XIIIe et XIVe siècle est pu amélioré la prodution de grandes tôles en améliorant, entre autre, les techniques d'épuration de métal et de platinerie.
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beraud de mercoeur
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lun. sept. 25, 2006 7:02 pm

très bonne remarque que la dernière sur le martinet. L'énergie hydaulique à révolutionné beaucoup de techniques.
je pense en particulier au polissage. Faudra que je remette la main sur une enluminure qui montre un type assis devant d'immenses roues mues par une roues à aubes et qui poli un plastron d'armure. Elle est assez tardive mais réelle.
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Réchignac
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lun. sept. 25, 2006 11:51 pm

Beraud de Mercoeur a dit : je pense en particulier au polissage. Faudra que je remette la main sur une enluminure qui montre un type assis devant d'immenses roues mues par une roues à aubes et qui poli un plastron d'armure. Elle est assez tardive mais réelle.
Et il n'y en a pas qu'une seule Beraud. Il en existe plusieurs. Effectivement elles sont tardives (XVIIème).
Mais pour moi ça ne fait aucun doute pour le XVème vu qu'une grande partie des armureries Tourangelles étaient basées dans des moulins à Eau à l'extérieur de la Ville prés des cours d'eau.
Et c'était certainement pas parce qu'ils avaient soif.
Sinon on retrouve des textes de "locations" de moulins pour le travail des armuriers.
J'ai même fait une étude petite etude sur les moulins à eau XVèmes où je me suis amusé à faire des petits calculs entre la vitesse des moulins de l'époque et la vitesse qu'on pourrais obtenir avec un disque monté sur un arbre.
Et bien suivant la taille du disque on obtient des vitesses de rotation plus rapide que mes disques tournant à 1500 tr/ minute.
J'ai calculé en faite la vitesse de déplacement d'un point à l'extrémité du disque.
J'en suis donc arrivé à la conclusion qu'ils avaient dès le XVème la technologie pour polir les pièces .
Il ne faut pas oublié aussi qu'il apparait au XVème un métier spécialisé la dedans dans les armureries qui est celui de "Fourbisseur de Harnois".
JME Reproductions Antiques et Médiévales
Armures, cottes de mailles rivetées et bouclerie
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medieviste
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mar. sept. 26, 2006 10:29 am

Plus ancien, c'est un texte du VIe ou VIIe siècle : une lettre de remerciement pour un lot d'épées, "si parfaites qu'on peut voir le reflet de son visage dedans" : le fait qu'on parle du reflet du visage indique un poli miroir, si on voit le reflet de la tête (mais pas du visage) ça indiquerait un poli satiné.

Oui, avec ou sans machines à polir, nos ancêtres savent travailler pour obtenir un objet magnifique...
Reinhardt von Rappolstein
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