De "la très haute technicité des forgerons" au Moy

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Modérateur : L'équipe des gentils modos

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vuillem
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jeu. août 24, 2006 4:41 pm

Après mettre faire traité de rigolo et de facho pour un membre de ce forum, je pouvais difficilement rester tranquille... Donc, au sujet de "la très haute technicité des forgerons", j'ai décidé de montrer quelques exemples. Et oui, au Moyen Age, les forgerons étaient aussi capable de faire du métal plein d'impuretés. Il n'y a qu'"à la Moyen Age" que les forgerons étaient tellement forts qu'ils faisaient tout bien...

Alors, pour commencer, en exclusivité pour ce forum, parce que je n'ai toujours pas publié là-dessus, voici un premier cas. C'est une plaque de brigandine datée de la fin du XIV-début XVeme, découverte avec 80 copines au château du Hohenfels en Alsace, et conservé au musée de Niederbronn les Bains. La micrographie montre la matrice métallique avant attaque chimique. Elle est verte parce qu'elle obervée sous lumière polarisée. Les grosses taches noires et grises sont des impuretés non métalliques (silicate et wüstite).
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Et comme je vous aime bien, j'ai investi dans des photocopies à la BNF (putain c'est cher) Désolé, pour la qualité... C'est tiré du livre The Knight and the blast furnace d'A. Williams.

la première micorgraphie est prise sur je ne sais plus où de l'armure de 1460 montrée à côté. C'est un peu plus dure à comprendre. On regarde la micro du haut... Voilà... et c'est une tôle vu dans son épaisseur après attaque chimique au nital (acide nitrique + éthanol). A gauche, le gris, c'est de l'acier doux (pour faire simple), au milieu c'est soit de l'acier un peu plus carburé, soit une soudure pourrie, soit une zone de corrosion. Et à droite c'est de la ferrite, autrement dit du fer "pur". Les grains noirs dans la partie blanche de droite, ce sont des impuretés nettement visible (même si l'image est beaucoup trop clair). La micro du dessous, c'est un zoom sur la zone en acier.
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Dernier exemple: alors là, on est plus "à le Moyen Age" mais après, en 1540. Parce que la vie ne s'arrête pas en 1492...
Ce sont des éléments en métal ferreux décorés d'une selle, apparement. La micrographie du bas est un peu comme l'autre. C'est après attaque chimique au Nital (ça révèle les carbures). C'est une section complère, en haut c'est de l'acier, en dessous c'est du fer. Les grands traits tout droit, c'est parce que le type qui a fait l'échantillon à fait ça comme un sagouin... c'est tout rayé. Sinon, toujours pareil, les chapelets noirs dans le blanc, ce sont des inclusions non métallique.
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J'espère que c'est un peu plus claire comme ça...

A bon entendeur..
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vuillem
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jeu. août 24, 2006 4:55 pm

non... ça c'était ma maîtrise... j'ai besoin de 10 000 euros pour ma thèse ... et pour l'instant j'ai rien... :ouin: :ouin:
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malko
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ven. août 25, 2006 3:22 am

Même si ce n'est pas du tout mon rayon, je me suis régalé à lire ton message.
Merci Vuillem et surtout, tu as raison de ne pas telaisser marcher sur les pieds. ;)
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vuillem
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ven. août 25, 2006 3:55 am

A oui, et pendant que j'y pense... "à le Moyen Age" du XVeme siècle toutes les armures étaient en acier trempé... Et bah non... Les parties en acier des exemples montrés ci-dessus ne le sont pas. Et je pourrais en montrer encore 5 ou 6 exemples.

Je tiens quand même aussi à dire, pour ne pas tomber dans le travers inverse, qu'il existe aussi des cas où le métal est d'une très grande qualité et que c'est un acier très dure, trempé et revenu. Les armuriers sont aussi capable de faire bien, voir très bien.
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le nocturne
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ven. août 25, 2006 3:43 pm

salut a toi penses tu qu'il y avait de tres bon acier pour les riches et du melanges de "fer et d'acier" pour la "pietaille" ou c'etait plutot la qualite de travaille du forgeron que l'on avait sur place.il y a des bon et des mauvais forgerons car a l'epoque il devait travailler leur eponge pour arriver a sortir un lingot d'"acier" ou de fer.pas facile de realiser un lingot d'acier dur sans une acierie...
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vuillem
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dim. août 27, 2006 4:37 pm

En fait, ce n'est pas l'armurier qui produit son métal. En général, le métal est produit par des spécialistes qui ne font que ça. On connaît aussi certains cas où des forges d'élaboration sont associées à des "grosses forges" pour des objets produits "en série" comme des fers de pelles et des socs de charrues.

A. Williams montre dans ces analyses qu'effecivement il existe une production d'armures qu'il appelle "armures munitions" qui sont faites en série avec du métal de mauvaise qualité du genre fer phosphoreux, sans acier. Cependant, on connaît certaines armures de l'élite qui sont fait dans des aciers doux voir dans des fers. De toute façon, il n'y pas de règles. L'ensemble des analyses montrent qu'il faut attendre le XVeme siècle pour voir l'acier utilisé de manière plus systématique dans les armures. Au XIVeme, on trouve de tout.

En ce qui concerne le mélange fer-acier en couche comme on le voit dans les 2 derniers cas que j'ai montré, le résultat de ces analyses sont assez paradoxales. Théoriquement, un métal hétérogène est un "composite". Hors, d'un point de vue mécanique, les composites ont une meilleur résistance mécanique. Ce qui est paradoxale, c'est l'interprétation de ces analyses qui sont faites sur un petit échantillon de métal. Si le métal est réellement totalement hétérogène, on peut imaginer avoir une amure faite avec des "morceaux" de métal allant de 0,02% de carbone à 0,7 ou 0,8 % réparti de manière totalement anarchique. OU on peut avoir une armure dont la totalité de la tôle est un composite fer-acier homogène. Rien n'est très sûr pour l'instant dans l'ensemble des analyses qui ont été faites.

Il est probable que l'armurier quand il reçoit son métal est capable d'évaluer ça dureté, sa forgeabilité et donc son intérêt pour produire une armure. Par contre, il ne sait pas forcément à quoi la microstructure de son métal ressemble. Si on raisonne sur l'intérêt d'un métal pour une armurier, il ne faut donc pas trop raisonner sur l'aspect direct du métal vue en micrographie, mais plutôt sur les propriétés mécaniques que ce métal peut donner.
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Réchignac
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lun. août 28, 2006 1:39 am

Merci de le réexpliquer ici.
Il y a un petit moment de ça j'avais expliqué à peu prés la même chose dans un post. J'avais scanné un document sur des analyses métallurgiques sur des pièces d'armures XVèmes pour montrer qu'il y avait trés peu de pièces XVème en acier trempées.
Que la plupart des aciers des armures étaient des aciers à basse teneur en carbone ne prenant pas la trempe. Qu'il ya eu des plastrons avec 0% de carbone etc etc.
Et enfin qu'ils n'ont pas compensé le manque de solidité par des grosses épaisseurs.
Le seul moyen de rendre dure un acier doux c'est de travailler par écrouissage comme le fait albert jauret.
Voila ce que j'explique aux gens et aux reconstituteurs en gros.
on pourrait en discuter des heures mais je résume ici ma pensée comme toi.
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taurus
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lun. août 28, 2006 4:24 am

Arrêtez moi si je dis une bétise : globalement, le forgeron sait par empirisme (expérience, habitude...) à quoi peut servir son métal. Ce qui ne l'empêche pas (si j'ai bien compris) de l'utiliser parfois pour autre chose.
C'est le paradoxe qui m'intéresse sur le composite. L'expérience n'a-t-elle pas pu démontrer sur une longue période l'intérêt de ses matériaux impurs ??? Pourrais-tu envisager l'analyse (dans le cadre de ta thése) d'armures "haut-de-gamme" ???
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vuillem
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lun. août 28, 2006 4:37 am

L'hétérogénéité d'un métal n'est pas ce qui fait son impureté. Les impuretés sont des inclusions non métalliques ou des porosités dans le métal. L'hétérogénéité n'est pas forcément en soi une mauvaise chose. Mais, il faut se demander si une tôle dont les proportions de carbone varient fortement et de manière aléatoire à une meilleur résistance mécanique qu'une tôle homogène. Il ne faut pas oublier non plus que la présence d'inclusions peut aider à renforcer ces propriétés mécanique mais en fonction du nombre et de leur taille être une véritable raison de la fragilité d'une tôle.

Ce que sait le forgeron, c'est ce qu'il peut faire avec son métal. Ceci dit, il existe des procès où des armuriers n'ont pas vendus des armures suffisemment dure. Ont-ils fait une erreur ou le font-ils délibérément ? Bref, il est clair qu'ils ne pensaient pas le métal comme nous. Donc toutes ces impuretés et ces hétérogénéités ne doivent pas forcément être considéré comme une mauvais chose. Sur la compréhension du métal, jusqu'au XIXeme siècle, on pensait que le métal pur était l'acier et l'impure le fer. Alors que c'est l'inverse. L'acier est un alliage, le fer est le métal pur.

Quant à ma thèse, elle porte sur des sites de réduction de minerai de fer de la fin du Moyen Age. J'ai laisser tomber les armures après ma maîtrise faute d'avoir accès à des pièces à étudier. Il y a 4 ans, le musée de l'Armée refusait toute étude métallographique et ils ne sont pas les seuls. De toute façon, sur les armures de l'élite, il y a le bouquin de Williams, où on voit plusieurs dizaine d'analyses d'armures de l'élite (qui sont criticable, certes). Les exemples que j'ai donné au dessus en font parti.
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gros poulet
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lun. août 28, 2006 2:03 pm

sur la qualité du métal, on retrouve (pff je me rappelle plus la source) des ordonances qui interdisent aux armuriers de tout poil d'utiliser du fer de certaines provenances car de trop mauvaise qualité. à l'inverse, certaines mines sont réputées pour leur production.
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mar. août 29, 2006 1:38 am

quelqu'un peut-il m'expliquer (simplement) ce qu'est le "grappage" ? car sur forgefr, il y a quelques reportage sur cela est il semble bien qu'ils fassent ça dans le jardin, dans des fours bricolés et avec une ventilation étudiée mais simple et naturelle...

Sinon c'est vrai qu'en ventilation naturelle on peut monter à température de fusion : j'ai fondu cette été ma grille de barbecue en posant du charbon dessus (une bonne quantité quand même) et en l'oubliant trop longtemps...
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vuillem
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mar. août 29, 2006 8:47 am

le grappage consiste a porter à température de soudure des morceaux de métal dans un foyer fermés pour qu'il s'agglomèrent entre eux. C'est une technique de recyclage des chutes de métal, de vieux bouts qui traîne, etc... je connais quelqu'un qui s'est amusé à grapper des capsules de canettes de Kro. Le foyer doît être bien fermer et chargé en charbon pour que le métal reste en milieu réducteur et ne s'oxyde pas. C'est faisable en faisant un trou dans le sol.
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mar. août 29, 2006 9:10 am

mais en ventilation naturelle ou en ventilation forcée ?
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vuillem
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mar. août 29, 2006 9:15 am

Il faut une ventilation forcée. Un aspirateur bidouillé est suffisant; le mieux étant de récupérer un moteur de hotte aspirante . ;)
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mar. août 29, 2006 9:17 am

ok, je croyais que c'était avec un tirage naturel et ça me chiffonait, pour la ventilation j'ai ce qu'il faut : j'ai remplacé sur ma forge mon gonfleur bricolé par un moteur d'injection de chaudière à mazout...
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