Forum des Guerriers du Moyen-Age

Je ne peux m'empêcher de partager quelques infos extrêmement intéressantes avec tout passionné du XIIIe : comme déjà cité diverses fois sur le forum, j'ai un mémoire de maîtrise réalisé par un étudiant en 1994 à Strasbourg sur un recueil de plus de 20 000 vers rédigé par Guillaume Guiart, un sergent à pieds dans l'armée de Philippe le Bel, vers 1304-1307, lors de sa convalescence durant la guerre de Flandres.
Quelques observations fabuleuses : un sergent issu de la petite bourgeoisie parisienne qui sait lire, écrire et en plus faire de la poésie en vers, ça va un peu à l'encontre de notre vision d'un soldat !

Ensuite le témoignage est extra, car c'est pour une fois un point de vue d'un soldat, pas d'un chevalier, et même si lui aussi donne plus d'infos sur les chevaliers, ses infos sur les soldats sont présentes, intéressantes, et directement dignes d'intérêt, vu qu'il est soldat, il sait très bien de quoi il parle, lui !

Comme déjà cité dans le topic de Bouchard, on voit déjà un soin tout particulier du soldat vis à vis de son épée :

- elle est dérouillée, nettoyée, fourbie et je cite "les espées nues aus pommiaus clairs et poi maschuréz" (pommeau clair = poncés, polis, voire même poli miroir, allez savoir, en tout cas tout sauf noir de forge ou rouillé)

- elle est toujours dans un fourreau, quel qu'il soit, sauf pour les ribauds : il parle de ribauds "l'un (ribaud" tient une épée sans fourreau" (vers 19808)

- la plupart des soldats possèdent une épée, même les ribauds (mais parfois dénuée de fourreau dans ce dernier cas) ou un fauchon. Et ils l'entretiennent apparemment avec grand soin après chaque combat.

- les épées de soldats se cassent apparemment souvent (du moins bien plus souvent que celles des chevaliers : à chaque mention d'épée cassée et réparée, ça concerne les soldats) :
"Et les espées esgrunées :
Faillies sont les plus seures
Assez près des enhendéures,
Tant en ont asprement tranchié"
L'endendéure désigne la poignée, donc apparemment l'épée se rompait souvent à cet endroit, MAIS
"Les uns font faire enhendéures
Es espées toutes nouvelles,
Et font fourbir les alemèles"
Cela signifie que soit ils font refaire les poignées brisées, soit ils font fourbir les lames (alemèles) : donc il y a du personnel qualifié (forgerons de campagne) à disposition pour réparer immédiatement le matériel, plutôt intéressant comme info sur l'ost en campagne !

- Il semblerait qu'il y ait pas mal de fauchons : "Alors on voit les rangs frémir, les fauchons dressés", ou "fauchons tranchanz", ou "serjanz ... a bons fauchons clers et tranchans" ou encore là où leur groupe (aux soldats) était le plus resserré il y avait "maint bon fauchon pour estal rendre" : impossible de déterminer la proportion épées/fauchons, mais ce dernier semble plus présent qu'on n'aurait cru, et apparemment plutôt chez les piétons que les cavaliers !

Voilà quelques infos à mon sens dignes d'intérêt.
L'idéal étant bien entendu d'avoir accès à l'ensemble de l'oeuvre, en version originale et traduction (tant qu'à faire), mais ça, je ne sais où on peut en trouver une version imprimée...

Salut,Médiéviste,
merci de ces infos,y a-t-il un passage;dans ton mémoire;où ce sergent fait mention des "gens" qui les encadrent? à savoir pour celui qui m'intéresse Anseau de Joinville ?
merci
A+

Non, je n'ai rien vu de tel.
Mais je le répète, je n'ai qu'une petite partie de l'oeuvre, des extraits cités dans le mémoire de l'étudiant, Thomas EBER...

OUPS !!! milles pardons!
j'avais,dans ma fougue zappé le "sur"
merci quand même
A+

L'oeuvre de Guillaume Guiart est telechargeable sur Gallica (site de la BNF). Il s'agit de "La Branche des royaux lignages" et qui est en effet un document excessivement interressant sur les armées des années 1300 et permet de mieux se rendre compte de certaines realités car ecrit par quelqu'un issu de classes sociales moins prestigieuses que ce qu'on a l'habitude de voir.
Il parle d'enormement de choses et ses descrïption sont ultra precises.
C'est une longue oeuvre a imprimer mais franchement la lecture est mille fois plus agreable sur papier et vous pouvez etre sur que c'est un document qui vous servira si ca colle avec votre periode.
Si quelqu'un n'arrive pas a le telecharger j'en ai une version PDF
Cordialement
Fabien
PS: Par Contre Medieviste, si tu avais plus d'infos sur ce fameux memoire, ca m'interresserais grandement...

Merci pour ce post!

Ben l'étudiant est Thomas ber, soutenu fin 1994 sous la direction de M. Jean-Michel MEHL à la fac d'histoire de Strasbourg.
Ce que je peux dire (sans être "cassant") c'est que l'étudiant en question devait être un théoricien, et aucunement informé de la réalité matérielle des armes et armures, car il y a pas mal de passages où il se plante en beauté, du genre quand il parle de la sacquebute qui vient crocheter un haubert, selon lui si on tire une maille du haubert, toutes les autres tombent avec (un peu comme un tricot où un fil tiré vient bousiller le reste...) ou une erreur énôôôrme (mais ô combien fréquente à cause de notre vieux pote Viollet le Duc) où il confond le goedendac avec la vouge... ou encore le fauchon avec une faux de guerre...
Disons que son analyse est un peu dépassée, faute de connaissances plus pointues (il n'y en avait pas autant à l'époque, Internet n'existait pas, et le forum GMA non plus, forcément)
Mais au moins il y a plusieurs passages sympas sur les campements, les soldats en marche, leur équipement...

Merci des infos
Cordialement
Fabien

Excellent ! il nous faudrait bien plus de témoignages de ce genre, les infos que l'on y trouve sont vraiment rares et originales

C'est sur, et remets en compte souvent les idées préconçu, style sur le fauchon .... Grand merci pour ce post,

Oui mais c'est début XIVème frère, ne t'emballes pas ...