Page 1 sur 4
Posté : mer. août 12, 2009 4:21 am
par jimmy
Bonjour.
Après une discution aux médiévales de Crevecoeur en auge qui portait sur le vocabulaire pourpoint/doublet, je me pose une question. En fait le terme de doublet pour désigner un vêtement de deux toiles en opposition au pourpoint, vêtement à rembourrage serait peut être une invention de notre part. Le terme "doublet" en anglais serait simplement l'équivalant de "pourpointer" en français. Donc doublet et pourpoint serait la même chose, à savoir, un vêtement rembourré. Effectivement le terme doublet existe dans les statuts de pourpointier français au XIV et XVeme siècle, mais je ne l'ai vu que pour des villes du nord de la France. Donc anglissisme possible (ce n'est qu'hypothèse). Enfin bref, en gros je me demande si la grosse majorité des pourpoints/doublets que nous portons, qui ne sont pas rembourrés, sont en cela bien histo/correct ?
Posté : jeu. août 13, 2009 3:13 am
par la louvette
"Le vocabulaire est bien sans doute le document le plus riche dont dispose l'historien, le plus riche mais aussi le plus difficile à exploiter car les mots sont des enveloppes dont le contenu n'a pas le même sens dans les milieux sociaux et se modifie d'autre part avec le temps."
Georges Duby.
Posté : jeu. août 13, 2009 3:30 am
par medieviste
Ah ce vieux Georges.
Je ne suis pas spécialiste du tout du XVe, mais je rejoins cette quête d'infos, car je fais la même recherche pour le XIIIe : j'ai toujours les oreilles écorchées quand j'entends parler de "cotte" de mailles ou pire, de "gant en cotte" de mailles ou de "jupette en cotte" de mailles, termes 100 % modernes et inconcevables dans la bouche de nos ancètres.
Idem avec le terme anglais moderne de "long bow" auquel on préférera grand arc ou arc droit ou arc de guerre tout bêtement.
La liste est longue.
Bon courage même si pour le moment peu de personnes apportent des infos croustillantes à cette question !
Posté : jeu. août 13, 2009 3:43 am
par jimmy
Après quelque soit le vocabulaire. Je constate que les régles des métiers de pourpointiers ne font mention que de vetements rembourer à la bourre ou l'estouffe de laine, coton... Donc il y a la question du vocabulaire bien sure, mais il y a aussi l'interrogation de voir que tout les pourpoints en reconstit ( pour la majorité j'entend bien) ne sont pas rembourés. Ceci n'est il pas en contradiction avec les sources écrites.
Posté : jeu. août 13, 2009 3:48 am
par medieviste
Si, si.
Mais il faut chaud en été... Rares sont ceux qui se promènent en tenue normale, la plupart se mettent en sous-vêtements sur le campement dès qu'il fait un peu chaud, alors que penser de vêtements civils rembourrés ? Or les sorties (fêtes, off, etc) sont majoritairement en été...
C'est aussi dans cette direction qu'il faut chercher, non ?
Posté : jeu. août 13, 2009 4:28 am
par Ysengrijn
Ben oui, vous avez raison. J'ai du acheter 4 doublets (ou pourpoint, comme vous voudrez) avant de tomber sur un qui soit bon à ce niveau. Certains doublets, sont effectivement doublés mais j'en ai rarement vu. Je n'ai pas spécialement plus chaud depuis que j'en porte un (mais bon, c'est vrai qu'en Belgique, on ne doit pas subir, ou alors c'est rare, des températures de 35°C à l'ombre).
Posté : ven. août 14, 2009 4:35 am
par enguerrand le baille
Oui la question a déjà été abordé, et c'est vrai que c'est pas facile facile....
mais ne peut-on pas estimer qu'un pourpoint fait de laine et de lin est déjà un "doublet" car avec une double couche de tissu?? (laine à l'extérieur, lin à l'intérieur)
j'en ai un construction (depuis des mois...je traine!) et j'ai bien l'intention de le pourpointer au niveau du thorax (enfin surtout au niveau des pectoraux)
à dieu
Enguerrand
Posté : lun. août 17, 2009 6:26 am
par ambract
ce n'est pas nouveau Jimmy, ce problème de vocabulaire, on en parlait avec Torneirie à Loches.
Les pourpoints doivent effectivement comporter un mince capitonnage de bourre de coton, ce qui ne les rend pas forcement très épais, mais encore plus confortable en tout cas. Le terme de "doublet" apparait quant à lui en France, pas de soucis, mais dans curieusement dans les zones ayant été sous influence anglaise (guyenne) :-)
révisons notre vocabulaire.
Tu veux faire concurrence à Cracou?^^
Posté : lun. août 17, 2009 3:48 pm
par rolland de glabbecke
AMBRACT a dit : ce n'est pas nouveau Jimmy, ce problème de vocabulaire, on en parlait avec Torneirie à Loches.
Les pourpoints doivent effectivement comporter un mince capitonnage de bourre de coton, ce qui ne les rend pas forcement très épais, mais encore plus confortable en tout cas. Le terme de "doublet" apparait quant à lui en France, pas de soucis, mais dans curieusement dans les zones ayant été sous influence anglaise (guyenne) :-)
révisons notre vocabulaire.
Tu veux faire concurrence à Cracou?^^
Entièrement d'accord. Ambract doit se souvenir de mes prises de têtes, il y a quelques années déjà sur un autre forum.
En ce qui me concerne, ce qui n'est pas pourpointé ne peut être un pourpoint.
Posté : lun. août 17, 2009 4:38 pm
par le furet
Pardonnez mon intrusion dans le débat mais se pourrait-il que la distinction recouvre aussi une querelle économique.
Je crois savoir qu'il y a une corpo/guilde des pourpointiers avec, d'après ce que me racontait la Cornouille, un réglement strict fin XVéme. Réglement qui laisse d'ailleurs supposer l'existence de contrefaçon ou de non respect des "normes".
L'existence du doublet, en plus d'être probablement issu de la sphére d'influence Anglaise, n'est-il pas un moyen de contourner un monopole artisanal pour un vêtement très similaire ?
(question de pure curiosité)
A+
Posté : mar. août 18, 2009 2:42 am
par ambract
en fait, et cela depuis le XIVe, chaque métier avait des règles de fabrication et d'organisation très précises, et la construction des gippons (terme le plus utilisé à la fin du XIVe et début XVe), puis pourpoint 'cela recouvre le même type de vêtement, le vocabulaire, multiple, évolue simplement) est parfaitement connue et détaillée.
Une couche extérieure en drap (pour le commun), puis un contre endroit (en toile, de la même couleur que l'exterieur, ce qui regle l'eternelle question de la teinture du lin), de 4 à 8 toiles de lin, et un contre envers qui fait office de doublure (pour cela je renvoie u montage du pourpoint de Charles de Blois, grâce auquel on peut se rendre compte que la doublure moderne que l'on utilise aujourd'hui pour nos fringues n'est pas utilisée, au moins, pour les pourpoints).
Au milieu de tout cela, on trouve un capitonnage de bourre coton, rarement en laine (cela de la tolérance de certains règlements, la laine de mouton cardée n'est vraiment tolérée qu'à la fin du XVe vu le prix devenu trop élevé du coton).
Si ces règles de base (il en existe d'autres évidemment, sur l'usage de toiles d'occas', sur les tissus que le client peut fournir au pourpointiers, etc) ne sont pas respectées, ce que l'on appelle dans le nord des "Eswars" (doivent bien avoir d'autres noms ailleurs ces hommes là^^), des "inspecteurs" des travaux en fait, attachés à chaque corps de métier décident s'ils sont vendables ou non. Dans ce cas les pourpoints sont brulés, et le contrevenant reçoit une amende.
Ceci est un petit condensé d'un passage d'un article que j'ai écris sur l'évolution et la construction du vêtement court masculin, qui paraitra en novembre normalement dans la nouvelle revue de l'APHV (à l'occasion du marché de Pontoise)
C'est une 'tite previw quoi ;-)
Et pis Roro, ouais, c'était le bon vieux temps, on pouvait fighter sur 10 pages, se réconcilier, et re fighter! ahhhhh on vieillis les gars!
Posté : mar. août 18, 2009 9:07 am
par jimmy
Merci Ambract pour tous ces détails (que l'on peut retrouver en langage d'époque sur le site du rosier des guerres avec des extraits de règlement de pourpointiers de Tours, Amiens...
Donc la réponse à la question semble être : oui la majorité des pourpoints restitués aujourd'hui ne suit pas les règlements d'époque. Question de facilité? Méconnaissance des règlements?... Bah le pourpoint que je commencerai d'ici peu de temps sera rembourré en tout cas.
Posté : mer. août 19, 2009 6:24 am
par ambract
tu as bien résumé: facilité et méconnaissance
Posté : mer. août 19, 2009 12:57 pm
par talhefer
super intéressant comme post.
Malgré les très pointues précisions d'ambract, je me pose toujours une question ... est-ce une généralité ? doit-on obligatoirement trouver des doublets aussi rembourrés ?
les températures du moment me font douter, bien que la laine soit un isolant du chaud come du froid. Des régions méridionales comme l'Italie ou le sud Français faisaient comment ?
Peut-il y avoir un doublet d'hiver, et un doublet d'été, bref ... des tenues de saisons quoi
Posté : mer. août 19, 2009 2:59 pm
par rolland de glabbecke
AMBRACT a dit : tu as bien résumé: facilité et méconnaissance
J'aurais été un peu plus nuancé, cependant.
Car oui, nous avons de la source, mais de la source qui ne concerne qu'une fourchette d'années X dans une contrée bien précise Y. Et donc, fatalement, la réponse à Talhefer en découle.
Il me semble que les règles monastiques pourraient aussi nous aider. Si mes souvenirs sont bons, certaines règles d'ordres précisent bien la nature des vêtements et des draps ou toiles disponibles selon les saisons. Mais encore une fois, une source bien précise et surtout concise pour un certain type de personnage à un moment donné de l'histoire.
Généraliser serait à mon sens un défaut. Sans toutefois pouvoir étayer du contraire.