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Posté : dim. mai 20, 2007 2:50 pm
par medieviste
Une question qui travailel un peu tout le monde : quand apparait tel ou tel textile ?
Non pas pour légitimer le port d'une cotte civile XIIIe faite en Saint Thétique ou en Polie Esther, ou encore en Poli Ami de...

Mais histoire de savoir ce qui est histo et ce qui ne l'est pas pour une période donnée.

Alors j'ouvre le bal : le velours : quand apparait-il ?

Posté : dim. mai 20, 2007 2:56 pm
par perlinelatisserande
Ahah je t'ai piégé!! Lol
Bon ca m'interresse aussi

Je me souviens avoir lu que le velour apparaissait dans nos contrés européennes du "milieu" (ni trop au nord, ni trop au sud) au XIVem

La grande question à poser pour cette matière est aussi qu'est-ce que le velour...

Car il existe du velour de soie, du velour de laine, (du velour synthétique... on oublie) etc etc...
Alors quel velour? quel aspect? quand? et où?

Posté : dim. mai 20, 2007 3:02 pm
par medieviste
Tiens, ça colle avec ce que j'avais aussi entendu dire. Velours = XIVe environ.

Y a-t-il un spécialiste du XIVe dans la salle ?

Roro ? Où es-tu ?

Posté : dim. mai 20, 2007 3:12 pm
par perlinelatisserande
une toute petite piste pour commencer
(en tout cas... c'est riche!)
http://www.e-luxus-agnesalauzet.com/institu/hist.asp

Posté : dim. mai 20, 2007 3:18 pm
par medieviste
Ouh, joliii ! Merci Perline, c'est un site sympa avec quelques infos sympas, à vérifier et à approfondir !

Question naïve, le velours de soie, ça se présente sous quelle forme ? Ca ressemble à quoi ? C'est épais, fin, souple, raide, brillant, mat?

Posté : dim. mai 20, 2007 7:15 pm
par yrwanel
Velours?

En soie: apparition du velours de soie en Chine vers -800 AC.

ON SAIT aussi: voile de soie de Chine (quelques filaments résiduels...)sur une momie égyptienne de - 1000 AC

Romains: lois somptuaires concernant l'utilisation de la soie (cela leur bousillait leur balance commerciale, la consommation de soie!...), mentionnant entre autre le velours

Velours de soie: fabrication en Perse (avec introduction de la culture du vers à soie) vers + 500 PC

Utilisation certaine soit ARCHEOLOGIQUE: mérovingienne (voir fouille de St Denis): velours de soie.

Ceci est confirmé par les textes, acessoirement...

Baisse de la soie en Europe période carolingienne, vu l'expension de l'islam et des arabes.
Reprise du commerce vers les croisades... (par force + routes de la soie facilitée sous les Yuan: Gengis Khan et suite, si vous préférez)
Rappel: le procès des templiers leur a entre autres reproché, vu leur voeu de pauvreté, de porter des capes de velours de soie...

Velours de soie plus généralisé, effectivement, au XIVème: manufacturation du velours de soie en Italie =>> "plus accessible"

Désolée d'exploser un archétype textile.... [img]images/icones/icon17.gif[/img]

Posté : lun. mai 21, 2007 1:37 am
par oriabel
medieviste a dit : Question naïve, le velours de soie, ça se présente sous quelle forme ? Ca ressemble à quoi ? C'est épais, fin, souple, raide, brillant, mat?
Voilà la seule source dont le dispose : la dalmatique de Roger de Sicile (vers 1140)
Image

Le tissu est fin. Je n'ai eu que des avis contradictoires sur la qualité de la texture...tantôt c'est fin, tantôt c'est épais...

Posté : lun. mai 21, 2007 2:58 am
par Yvan de Tergate
Euh... C'est une source archéo ca ? Il a du y avoir une restauration pour avoir un tel état. C'est exposé à quel endroit ?

Posté : lun. mai 21, 2007 3:02 am
par oriabel
Oui, source archéo...Elle est exposée au musée de Vienne (Autriche) si mes souvenirs sont bons...Aucune idée des restaurations réalisées, mais vu de près, le tissu montre nettement des traces d'usure...Cette pièce est effectivement dans un état de conservation exceptionnel, mais c'est aussi le cas du manteau du sacre de Roger...une pure merveille...la photo est grande, mais l'objet mérite d'être vu en détails...

Image

Posté : lun. mai 21, 2007 7:07 am
par perlinelatisserande
Est-ce que quelqu'un as une idée de ce qu'est et à quoi ressemble le velour de laine? et a quelle époque on a pu l'utiliser?

Merci Ywanel pour ces précisions... As tu une idée de la fortune (je parle pas de statu puisque certains bourgeois peuvent être plus riche que des nobles) qu'il faut pour porter ce genre de choses? Un milieu spécial (royauté, religieux) etc??? (jpose la question pour du XIVem)

Posté : lun. mai 21, 2007 7:26 am
par flora the great_
D'après la pièce montrée par Oriabel il s'agirait de soie "brillante" or j'ai eut l'occasion de voir des vetements de reconstit en soie plus grossière et matte (même période).

Y a t'il difference d'appellation entre les deux?

J'ai lu que le travail de la soie était déjà rafinné a l'époque et que les "défauts" de type bouloches que l'on trouve dans la soie actuelle sous l'appellation "soie sauvage" n'étaient pas d'actualité.

Savez vous si on était plus a même de trouver de la soie "brillante" ou "épaisse et matte" (mais sans bouloches donc) au XIIIème? ...existait t'il une soie du riche et une soie du pauvre? (vu le prix ça m'étonnerais..)

Posté : lun. mai 21, 2007 7:53 am
par Yvan de Tergate
A ma connaissance, on trouve aujourd'hui principalement 3 / 4 types de soies, qui étaient également utilisée au MA (j'ai pas de source pour le confirmer) :

- Le pongé de soie : tissus souple, brillant et lisse.
- La soie sauvage : tissus assez rigide, brillant, assez lisse mais un peu rêche au toucher. Elle a souvent des reflets assez étranges.
- La bourrette de soie : tissus mat, souple et d'un aspect plus grossier.

J'ai déjà vu également de la mousseline de soie...

Posté : lun. mai 21, 2007 9:14 am
par yrwanel
Qualité des divers tissus de soie...

On retourne chez les chinois (par force!): tombe chinoise de -680: le défunt porte 12 types de tissus de soie différents...

Or, d'une part, la Chine exportait, et quelquefois à tour de bras, la soie, façonnée ou en fil... (ils avaient un très gros besoin de chevaux, et à certaines périodes, ils se sont fait solidement truandés: un cheval atteignant les 5000 rouleaux de soie...!!!)
D'autre part la sériciculture et les façonnages de la soie se sont déplacés vers l'ouest (voir supra).

=> les minimum 12 façonnages de la soie ont fini, par la porte ou la fenètre, par arriver ici...et assez tôt.


sinon:
taffetas
gaze
"mousseline" (je connais pas le mot chinois...)
velours (épinglé ou "normal" => différence d'aspect quant à la brillance)
pongé (là, il y a diverses qualités de pongé)
reps de chaine
reps de trame
sergé
satin
brocard
broché
lamé
shantung (dénomination "récente", mais les chinois étaient atrocement traditionalistes!)
velours broché (pas sûre que ce soit typiquement chinois. sans doute plus "tardif")

pour le reste: trou de mémoire...

Plus leur soie sauvage...

Pour Perline: coût de la soie....
cela dépend de la qualité de la soie, de son façonnage,.... et de la teinture!!!
Accessoirement, au fil du temps, le "cours" de la soie a changé...
Donc donner une idée "précise" du prix: faudrait avoir les comptes d'achat tout du long du MA (on a pas!), accessoirement éplucher tous les comptes et des maisons acheteuses pour sa consommation personnelle, et les comptes des marchands...
Et là, j'avoue ne pas avoir fait cette recherche hyper-spécialisée... je ne sais même pas si il y a eu une étude "d'ensemble" sur cette question!

Posté : mar. mai 22, 2007 3:22 am
par vuillem
Pour ce qui est de l'usage de la soie, j'avais posté une petite synthèse chez Beauj', je vous la remet ici:

Le tacuinem sanitatis présente les vêtements de soie et les statuts des pourpointiers de Paris de 1382 parlent souvent de soie (extraits, transcrïption par moi, original sur le site du Rozier des Guerre):

- Idem, que nul ne face de jupons de soie ni de camelot, s’il n’y met pas un bon contre-endroit de toile teinte ; et si cela est fait autrement, il paiera 10 sous parisis d’amende, dont 6 sous parisis pour le Roi et 4 aux gardes dudit métier ; et dans ce cas le travail sera décousu et donnée à refaire à l’ouvrier ou à un autre à ses dépends s’il ne veut le faire.

- Idem, qu’aucun ouvrier ne soit trop hardi de mettre du vieux coton ou d’autres vieilles étoffes en guise de garnement (rembourrage) neuf pour le vendre, sauf pour le contre envers et le contre endroit ou si c’est de la bourre de soie ou des bandes ( ?) de soie et de taffetas. Celui qui fera le contraire paiera 10 sous à appliquer comme ci-dessus, et le garnement sera brûlé devant la maison de celui qui l’aura fait.

- Idem, que nul ne fasse jacquets, dans la Ville, en banlieue, prévôtés et vicomté de Paris, à vendre ou à la demande de quelqu’un, dans lequel il y a de l’étoupes de laine, sous peine de les brûlés devant la maison de celui qui les aura faits, et l’amende sera de 20 sous parisis, c’est à savoir 15 au Roi et 5 aux gardes dudit métier ; ils seront tenu de les faire avec de bonnes étoffes et dans le respect de la loi, ainsi qu’il est accoutumé de faire en ladite ville de Paris, c’est, assavoir, que les jacquets fait à 2 fois doivent être de 5 toiles, dont les 4 paires peuvent être vieilles, et la cinquième doit être une toile neuve. Et les jacquets fait à une fois de coton et de bourre de soie doivent avoir un contre-endroit et un contre-envers, et il conviendra au métier que lesdits jacquets soient affermi (renforcé). Et qui fera autrement, l’œuvre sera décousue et les étoffes seront rendues à l’ouvrier ; et il paiera 20 sous d’amende, c’est assavoir 15 sous au Roi et 5 sous aux jurés.

- Idem, que nul ne mette vieille besogne avec la neuve sauf si ce sont des bordures ( ?) de draps avec lesquelles on bourde ( ?) les garnements et robes de soie ou de camelots bons et convenables, qu’aucun ne pourra acheter ou qu’aucun seigneur ne pourra les faire vendre ; et ceux-ci pourront les mettre en besogne quand ils n’ont auront guère été porté, en mettant un bon contre-endroit de la couleur du drap, sous peine de 10 sous à appliquer comme ci-dessus.

- Idem, qu’on puisse faire jacquets de soie à une fois, de quatre ou cinq livre d’étoffes bonnes et suffisantes de bourre de soie pris sur (au ?) métier, et y mettra contre-envers et contre-endroit.

Production de la soie en Europe:
la production se cantonne essentiellement au Sud de l'Europe: Italie et Espagne. En France, le livre des Métiers de Paris d'Etienne Boileau publié entre 1258 et 1268 rapporte que les tisseurs de soie « étaient assez nombeux pour justifier la création d’un règlement corportatif » et que ces ouvriers de la soie comprenaient des « métiers des tissus de soie », des « mestiers des draps de soie de Paris et vuluyaux et de boursserie enlice. »
Au début du XIVeme siècle, le pape fait planter des mûrier autour d’Avignon pour une production répondant à ses besoins. Cette production perdure au XVeme siècle et prend même de l'ampleur.
Dans une enluminuer française (De Claris Mulieribus de Boccace),on voit des femmes ramassant des cocons sur un mûrier et tissant de la soie. (SCOTT P., Le livre de la Soie, Paris, 1993, p.173)

Il y a une petite bibliographie sur le sujet, dont voici une rapide synthèse:
Utilisation de la soie:

Dès les dernières décennies du XIVe siècle, les plus anciens inventaire dijonnais dénombrent, même sur les lits couverts de simple courtepointes, des « oreillers » le plus souvent en toile, mais parfois houssés d’une soierie légère de couleur et soigneusement recouverts d’une garniture de toile brodée qui devait laisser apparaître le tissu précieux.
Très tôt dans l'apparition de la mode du pourpoint, les puissants seigneurs les font plus volontiers tailler dans des soieries de prix. A la cour du Duc de Bourgognne, dès 1389-1390, c'est le début des utilisations des étoffes de soies noirs chez les princes. Sans jamais égaler le luxe tapageur du chambellan, une veuve de chevalier, un écuyer, un conseiller du duc se doivent de posséder une cotte ou une robe de soie.
Parmi les inventaires après décès dijonnais de 1390-1405 de citadins (32 inventaires), on trouve toutes sortes de vêtements de soie: corsots et houpelandes, gipons, jaques et jaquettes, « habits », sacs, et aussi des accessoires tels que manches et estraintes. Ces tissus de luxe, repérables par leur désignation, sont réservés à une petite élite : sept personnages seulement, dont quatre appartiennent à l’entourage ducal : un grand seigneur, un cuisinier et un tailleur du duc, un valet de la duchesse. Ni écarlate, ni yrène pour les autres dijonnais ! La mention d’un unique vêtement de soie met en vedette un apothicaire et un personnage dont la profession est omise : sa vaste demeure, pourvue d’un colombier et la possession de cinq chevaux dénotent la solide fortune. Le cas de l’inventaire 540, celui d’un brodeur, est un peu particulier ; sans doute faut-il le rapprocher de celui du tailleur du duc de Bourgogne. En effet, les mentions de soieries correspondent, chez le premier, et à plusieurs reprises chez le second, à des pièces de vêtements inachevés, ce qui est logique étant donné leur métier, mais il ne s’agit pas alors de vêtements destinés à leur usage personnel.

La diffusion de la pelleterie est un peu plus large que la soirie. Elle confirme le classement, en tête, de trois membres de l’entourage du duc. Le valet de la duchesse se trouve quelque peu distancé par l’aristocratie urbaine : l’apothicaire qui figurait parmi les consommateurs de soieries, auquel s’ajoute un prêtre. Il se retrouve à égalité, pour le nombre de vêtements fourrés, avec le troisième bourgeois consommateur de soierie et des marchands : un mercier et un buvetier.

La soie est aussi utilisé, et légèrement plus diffusée, pour la réalisations de galons et de rubanss ainsi que des lacets.

synthèse et extrait des livres suivant:

PIPONNIER F., Costume et vie social, la cour d’Anjou XIVe-XVe siècle, Paris, 1970
PIPONNIER F., « Du drapeau à la cotte, vêtir l’enfant au Moyen-Age (XIIIe-XVe s.) », p.123-148 in PASTOUREAU M., Le vêtement, Histoire, archéologie et symbolique vestimentaire au Moyen Age, Paris, 1989
PIPONNIER F., « Etoffes de villes et étoffes de cour », p.160-183 in ROMAGNOLI D., La Ville et la Cour, des bonnes et des mauvaises manières, 1995
PIPONNIER F., « Matières premières du costume et groupes sociaux, Bourgogne XIVe-XVe siècle », in Inventaires après-décès et ventes de meubles, apports à une histoire de la vie économique XIVe-XIXe siècle, Louvain-la-Neuce, 1987
SCOTT P., Le livre de la Soie, Paris, 1993
CROWFOOT E., Textiles and clothing, c. 1150-1450, Londres, 1992

Posté : mar. mai 22, 2007 3:36 am
par alexandra
Magnifique boulot :clap: