Bonjour
Au-delà du problème posé par l’adjonction d’une hypothétique sangle sur un instrument de ce type, il y a d’abord plusieurs autres problèmes qui se présentent et qui mériteraient d’être observés :
Hedwige de Longuyon a dit : J'ai acheté récemment un luth arabe (médiéval, donc)...
Houlà ?... voilà une affaire bien vite accommodée !
1°) S’il s’agit d’un Úd (Oud), comme Vercoquin le pense, alors la configuration actuelle de l’instrument n’a rien de médiéval (ou si peu !). Il est bien sûr utilisé de nos jours par nombre de musiciens de tous niveaux et mis à toutes les sauces pour interpréter tout ou partie du répertoire médiéval, mais, en tout état de cause il ne s’agit là que d’un pis-aller, d’un ersatz des luths qui étaient utilisés alors en Orient, voire en Espagne jusqu’au XIIIème siècle.
Et si vous vous inscrivez Dame Hedwige dans une démarche que vous souhaitez (ou que vous présentez) comme un tant soit peu crédible, ou plus encore dans une démarche de reconstitution, alors ?... Mais, bon, chacune et chacun fait comme il l’entend, n’est-ce pas ?
Nous n’avons pas de représentations, ni de textes, qui pourraient attester de manière formelle la présence de ce type de luth en Occident (principalement au Nord), ou d’un instrument désigné sous ce vocable.
Plus tardivement, le luth médiéval (en général d’un gabarit inférieur à celui d’un Oud) et qui aura pour descendance le luth Renaissance, n’apparaît vraisemblablement pas en Occident avant le XIVème siècle. Par contre, jusque-là, d’autres instruments à cordes pincées ont été joués et seront encore joués assez tardivement. Instruments pour lesquels nous pouvons observer de très nombreuses représentations (iconographie peinte ou sculptée) et que l’on connaît relativement bien aujourd’hui. Ces instruments là seraient sans aucun doute préférables à un luth du XXIème siècle.
Le luth Renaissance lui-même, excepté sa forme globale, n’a pas grand-chose à voir avec un luth oriental, et ne se joue pas du tout de la même manière : le premier avec les doigts et un manche muni de frettes, et le second avec un plectre et un manche non fretté.
Au Moyen Âge (et plus tard aussi), le luth «arabe» (Oud) est en principe exclusivement joué par les hommes et de plus, le seul instrument admis pour jouer la musique sacrée chez les musulmans à cette époque... et peut-être même y est-il entièrement dédié... On aura alors beaucoup de mal à imaginer l’instrument déambulant dans les rues (même en Europe), pendu par une courroie au cou d’une charmante dame. Surtout si celle-ci est de haut rang : car le fait de jouer debout, ainsi que la présence de la courroie sont alors des marques de condition inférieure et d’assujettissement.
2°) S’il s’agit d’un Saz, les choses peuvent être considérées un petit peu différemment, quoique !
Nous n’avons pour la période médiévale aucune représentation de ce luth oriental à très long manche, même si d’aucun veulent y voir une "Maurache", ce qui en tant que tel, ne risque pas d’être attesté avant bien longtemps, et peut-être même jamais ?
L’instrument le plus approchant du Saz est le Colachon (ou colascione), mais celui-ci n’apparaîtra qu’au milieu du XVIIème.
NB : Pour ce qui m’a été possible de constater à travers les vidéos de Luc Arbogast dispo sur le Net, celui-ci (qui chante au demeurant fort bien) s’accompagne avec une sorte de bouzouki très moderne et dont l’accord semble à priori lui aussi assez éloigné de ce qui se pratiquait au Moyen Âge. Mais bon, là encore, chacun est libre de faire comme il lui plait.
Les aspects techniques mentionnés par Luc Arbogast et par Vercoquin concernant les difficultés à intégrer les supports d'une courroie à ce type d’instrument devraient vous inciter à ne pas tenter l’expérience, car il s’agit d’un instrument particulièrement fragile, surtout si c’est un Oud.
En espérant avoir pu vous aider dans votre démarche.