mar. mai 23, 2006 4:15 pm
j'ai qu'une bête licence (en Histoire, hein, j'ai d'autres diplômes plus élevés dans d'autres matières), mais je vais tenter d'aider notre brave questionneur, sans toutefois répondre directement à sa question.
Car déjà il y a un GROS problème dans la question: la période concernée, 2 siècles!
Or,le paysage démographique et économique de l'Europe change du tout au tout entre le début du XIVème et la fin du XVème.
Le début du XIVème sicècle est souvent surnommé "le Monde Plein", ce qui signifie que l'Europe est densément peuplée (compte tenu des moyens de subsistance de l'époque), et donc que beaucoup de gens ont des difficultés à joindre les deux bouts, alors que la fin du XVème siècle se caractérise par un essor démographique et économique après 150 ans de malheurs (épidémies et guerres). "La tierce partie du monde" a été victime de la Grande Peste, il ne faut pas l'oublier.
Donc, suivant la période où l'on pose le curseur, on arrive à des résultats trés différents.
Il en va de même en ce qui concerne l'espace: suivant que l'on parle d'un habitant d'une ville plutôt que d'un habitant de la campagne, ou d'un habitant de la Flandre ou de l'Italie du Nord (les deux zones développées de l'époque) plutôt que d'un habitant des montagnes du Massif Central, on arrivera à des résultats trés différents. Or, même au sein d'une même province, les particularismes étaient trés forts d'une zone à l'autre.
Il existe cependant quelques grands traits que l'on doit souligner.
Le premier est que les paysans du XVème siècle sont souvent prospéres, et les plus riches d'entre eux pénétrent aisément dans la noblesse. Il faut dire que nombre d'entre eux possédaient à cette époque de petits fiefs. En effet, la crise démographique a conduit à la fuite des paysans vers la qualité (meilleures terres, conditions d'exploitation plus souple). La concurrence entre seigneurs pour attirer les meilleurs exploitants à conduit à baisser de manière trés importante les conditions de location des terres. Les paysans s'enrichissent donc, même s'il faut tenir compte des guerres.
Les villes sont aux mains d'oligarchies plus ou moins liées au monde des marchands, dont les consuls ou échevins sont souvent issus, mais les banquiers (ou cambgeurs) et les officiers prennent de plus en plus de place. Les plus puissants entrent dans la noblesse.
L'aristocratie est sortie trés affaiblie du XIIIème siècle, la montée des bourgeois des villes associée à une démographie gallopante l'a mise à genoux. Elle bénéficie amplement de la crise démographique et réussit à reconstituer son patrimoine, souvent en se mettant au service des grands seigneurs et au prix d'alliance avec le bourgeoisie.
Concernant le coût de la vie, il est trés difficile d'utiliser les monnaies existant alors, tant elles sont nombreuses et variables quant à leur valeur (l'inflation a toujours existé).
En utilisant la valeur-travail (nombre de jours de travail d'un ouvrier nécessaires pour acheter quelquechose), on peut dire qu'une vache vaut plusieurs disaines de jours-travail, et qu'une armure plusieurs centaines. Le droit de bourgeoisie (pour devenir citoyen d'une ville) valait (suivant les période et les villes) entre 1 et 6 mois de temps-travail. Dans les villes flamandes entre 15 et 25% de la population totale avait le droit de bourgeoisie (sachant que le droit acquis par un homme se transmettait gratuitement à sa femme et aux enfants à naître). Le loyer d'une maison modeste valait plusieurs mois de travail (mais beaucoup de gens habitaient chez leur "maître").
J'évite de parler du prix du pain, car il va de soit qu'en travaillant (même une journée) on peut en acheter, et aussi parceque la pratique sociale de la charité faisait qu'il y avait des distributions gratuites depain extrêmement fréquentes (du moins dans les villes).
Bien entendu il s'agit pour estimer ce temps-travail d'un ouvrier modeste, de type "journalier" sans qualification particulière. Un ouvrier tanneur ou un ouvrier sayetteur (textile) pouvaient gagner beaucoup plus.
Mais au Moyen Age la disparité des fortunes était énorme, même si les frontières entre classes sociales étaient beaucoup plus perméables que ce que l'on croit généralement.