sam. mars 17, 2007 11:19 am
[quote]smyrnoff a dit :
Merci Ndoshta pour cet exposé exhaustif et toxicologique.
Mais or donc, l'empoisonnement des flèches de guerre semble avoir été "naturel" (oxydation des pointes, souillures du sol) et non pas volontaire, en tous cas dans notre moyen-âge nord-occidental.
Las, Chevalier du Chardon, je dois vous contre-dire.
Voici ce qui my amène :
L'usage des poisons allait à l'encontre du code d'honneur et il allait être diabolisé dès le 13ème siècle (si mes souvenirs sont bons côté datation... et j'ai un petit doute), leur usage officiel se cantonnant à quelques ordalies.
De fait, on en usait - moins qu'avant et l'arquebuse y mit fin- mais on ne s'en vantait pas. (Par contre, au 16ème, on administrait à des fins thérapeutiques du jus de momie -beurk- dont parle Ambroise Paré -le Discours de la Licorne). Donc le fléau d'armes et la poix, oui ! l'aconit et la jusquiame noire, non ! Toute une culture...
On l'évoquait peu, et on l'écrivait encore moins, d'où le peu de notes accessibles. N'oublions pas que les écrits dont nous disposons n'ont été publiés qu'après délivrance de l'imprimatur.
Avec si peu d'éléments : usage ou pas usage ?
Usage courant.
Je n'ai malheureusement pas le temps de traiter plus avant, mais citons un autre spécialiste des champs de bataille qui vous concerne plus, puisqu'il a beaucoup travaillé sur l'extraction des flèches. Une copie de ses écrits est à la Sorbonne. Sinon, toutes les bonnes universités disposent d'une édition de 1898. Je ne crois pas qu'on la trouve complète sur le web, mais je n'ai pas trop le temps de chercher.
Henri de Mondeville, dit Nicaise (13ème-14ème: Il apprend avec Jean Pitard, puis en Italie avec Théodoric et Lanfranc et devient chirurgien de Philippe le Bel).
Outre le fait qu'en préambule, il conseille, si l’extraction paraît difficile avec grand risque hémorragique, de ne pas opérer, que le blessé ne se soit confessé -ce qui est une sympathique attention- Il introduit ainsi son propos sur les extractions de flèches :
"il faut être attentif à deux choses : à l’extraction des engins fichés et à l’extraction d’autres objets, morceaux de verre et autres semblables. Le premier cas en comporte deux : 1°) les engins ne sont pas empoisonnés ; 2°) ils sont empoisonnés."
Il confirme et améliore Guillaume de Salicet, lui-même fidèle à Abulcasis de Cordoue, qui a agi de même avec les travaux de Paul d'Egine.Tous mentionnent l'empoisonnement des traits.
Pour répondre simplement, tout dépend où vous vous situez dans notre moyen-âge nord-occidental.
Si c'est entre le 8ème et le début du 14ème, la réponse à la question du Furet est catégorique :
il y a eu emploi volontaire de poisons, annexes aux techniques d'aggravation des blessures (fers à douille et à soie -extraits à l'impulsoir-, et fers barbelés-extraits à la canule d'airain ou à la plume d'oie) sur les flèches.
Cordialement,
Ndoshta.