Yvan de Tergate a dit : D'ailleurs, question bête mais pertinente : comment connaît-on aujourd'hui la surface des forêts du moyen-age ou même de l'antiquité ?
Simple ! Par études palynologiques, pardi !
La palyno, comment ça marche:
Faut trouver une tourbière (c'est encore là que ça marche le mieux), dans une tourbière, la matière organique s'accumule sans totalement disparaître et parmi les sédiments qui compose une tourbière, on trouve les pollens de la flore avoisinante. Hors, il est tout à fait possible qu'une tourbière soit en place depuis le début de l'holocène (voir parfois le Pléistocène ?)(fin de la Préhistoire, en gros). Si tout c'est bien passé, l'accumulation de matières organiques s'est fait verticalement, faisant que les éléments placés en bas sont les plus vieux et les éléments placés en haut les plus récents.
Une fois qu'on a une tourbière dont on estime qu'elle est assez ancienne (assez profonce, 1,50m à 2m de puissance), on fait un carottage verticale dans toute la hauteur de l'accumulation.
La carotte est ensuite découpée en tranche de 1 à 5 cm d'épaisseur (ça dépend des finances). Chaque tranche subit alors une série de traitements physico-chimiques qui ne laisse à la fin visible que les partie dures des pollens et des spores. Pour chaque tranche, on va alors compter en moyenne 300 pollens et les déterminer par types. Les plantes ont en gros toutes des pollens différents.
On obtient alors un diagramme de fréquence avec la hauteur de la carotte en ordonnée et le nombre de pollen pour chaque type en abscisse. Voir là un exemple
http://www.ac-nantes.fr:8080/peda/disc/ ... llenqu.htm
Ensuite, on phase le diagramme en mettant en évidence les périodes où un type d'arbre domine, ou encore les période où les cultures céréalières s'impose sur le couvert forestier, puis, on fait des datations C14 sur les niveaux de carottes correspondant. Comme ça, on a à la fois une image de la végétation, éventuellement du climat et des activités humaines dans l'espace de la tourbière raccordées à une chronologie.
Et pour une grande forêt, on applique la méthode à plusieurs tourbières.
exemple de ce que ça donne (Travaux de J.C Oillic, univ. de Rennes 1 en collaboration avec les miens):
Au centre de la photo, il y a un ferrier composé de scories de métallurgie du fer daté de la fin du Moyen Age (on ne le voit pas là, il est sous les arbres; et puis, pour les éventuels pilleurs de sites, il a déjà était fouillé, et le détecteur ça marche mal quand il y a des scories partout). Bref, du bord gauche au bord droit de la photo y a en gros 3 km. Quand on se trouve à cet endroit, la forêt paraît immense et impénétrable. Pourtant: elle n'existait pas comme ça avant le 1er siècle, elle est défrichée une première fois lors d'une probable colonisation mérovingienne. Le couvert forestier disparaît totalement une deuxième fois au XIVeme siècle lorsque les métallurgistes s'installent. Et enfin, il y a 160 ans, il n'y avait plus de forêt du tout à cet endroit, parce qu'on se trouve à 5 km des célèbres Forges de Paimpont qui ont brûlé tout le bois qui était là. Conclusion: ce bout de forêt à 160 ans maximum. Et on est en plein milieu de la forêt de Paimpont, la Brocéliande mythique. Et bien, la grande forêt magique et ancestrale.... on peut se demander ce qu'elle a d'ancestrale... JC Oillic continu ses travaux à l'échelle de la forêt. Je pense qu'on va avoir des surprises.
Voilà, c'était juste un exemple pour montrer que la question de l'évolution du couvert boisé est loin d'être simple.
Le monde est déjà saturé de passé, à tel point que le présent peut à peine y trouver ça place (L. Olivier/Le sombre abîme du temps)