Armure franc an mil

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Modérateur : L'équipe des gentils modos

petit robert_

sam. déc. 29, 2007 9:35 pm

Je reconstitue au sein de la compagnie Foulques Nerra un personnage noble de petite envergure, et j'aimerais savoir quelle type d'armure outre la cotte de maille et le gambison je pourrais porter.
J'ai pensé à une broigne de plaque de fer ou à une armure en cuir lamellaire. J'aimerais savoir ce qui est faisable ?
Le port d'un gambison est t'il nécessaire en dessous d'une telle armure ? ou un aketon ? Ou est ce que le gambison ne se porte que seul ou avec cotte de maille ?
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medieviste
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dim. déc. 30, 2007 3:36 am

Ben pour commencer, si tu joues un noble de petite envergure, l'armure de mailles, tu peux l'oublier. C'est très rare et très cher autour de l'an mil.
Le gambeson, le débat a déjà été soulevé maintes fois : on n'a aucune preuve de son existence avant milieu-fin XIIe, même pour hastings il y a eu un gros débat (en gros résumé vite fait, on suppose que peut-être ça a pu exister, mais personne n'a jamais trouvé la moindre source... Berthramm et d'autres onziémistes en parleront mieux que moi)

D'après les fouilles du lac de Paladru, il semblerait que le plus sûr soit une broigne à plaques métalliques fixées sur du cuir.
Ou encore l'armure d'écailles (mais quelle forme pour les écailles ? Quelle taille ?)
Reinhardt von Rappolstein
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rodoric
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dim. déc. 30, 2007 3:42 am

tu peux retrouver toutes les protections possibles :
maille
broigne rustrée
broigne à plaque
broigne seule
lamellaire au sud et est de l'Europe.
l'armure d'écaille est représentée aussi comme pour les carolingiens .

de toutes ces protections , il éxiste trés peu de piéces archéologiques pour la période 800-1000.

Comme il est dit plus haut , ton rang te donne le droit a des protections plus ''riches'' en métal

exemple de protections que tu peux interpréter : livre des Livre des Maccabees Xiéme

Image
Image
walfroy_

dim. déc. 30, 2007 9:09 am

Si tu veux interpréter un petit seigneur, tu peux tout envisager à condition de ne rien avoir de trop sophistiqué. Tu ne peux pas te permettre un équipement "dernier cri".
Rodoric a raison, il y a très peu de pièces archéologiques en métal pour la période 800/1000, mais aussi pour les autres. Et ceci pour une bonne raison qui est que le métal ne cesse de se réutiliser. Une maille, tout comme une épée etc... se transmet de générations en générations, se modifie, se répare. Alors pourquoi pas.
Pour ce qui est du gambisson, je n'entrerai pas dans ce débat, mais pourquoi attendre une douzaine de siècle pour se rendre compte que la maille n'est efficasse qu'avec un rembourrage en dessous pour amortir l'onde de choc?
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medieviste
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dim. déc. 30, 2007 12:05 pm

walfroy a dit : Pour ce qui est du gambisson, je n'entrerai pas dans ce débat, mais pourquoi attendre une douzaine de siècle pour se rendre compte que la maille n'est efficasse qu'avec un rembourrage en dessous pour amortir l'onde de choc?
Beeen, j'entre pas non plus dans le débat, mais objectivement, les Romains utilisaient massivement l'armure de mailles, on l'emploie épisodiquement du Ve au XIIe siècles, mais durant toutes les périodes citées, aucune trace d'un quelconque gambeson.
Ca ne veut pas dire qu'il n'existe pas, mais qu'on n'a aucune source, aucune trace de sa possible existence...

Donc dans une démarche scientifique, porter un gambeson avant le XIIe siècle est historiquement infondé.

Mais combattre en combat non chorégraphié sans gambeson est une démarche ... dangereuse.

Conclusion : porter un gambeson sous les mailels est parfois anachronique, mais c'est une question de sécurité et on rigole pas avec ça... Après, si on joue un perso VIe, IXe, ou Xe siècle par exemple, faut pas venir prétendre que le gambeson est histo.

Vala un p'tit résumé des débats anciens (qui vont certainement se réveiller à nouveau...)
Reinhardt von Rappolstein
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berhthramm
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dim. déc. 30, 2007 12:17 pm

Le Gambi n'est pas avéré au XI (pas de pièces archéo, pas de sources icono ou écrite, nada), il est seulement probable...
La seule (à ma connaissance) possibilité serait éventuellement la représentation d'Odon sur la Tapisserie, pas mal d'encre coule là dessus (et le fait qu'un noble de haut rang porte seulement un gambi n'est pas si inepte que ça vu son non engagement effectif pendant la Bataille (là les gens sont maintenant globalement d'accords (cf colloques de Cerisy et quelques autres)).

La maille oui mais pas forcément en rapport avec ton statut.

La broigne à plaques : avérées enzone franque, à la bonne période et pour une personne du statut que tu vise (cf Paladru et sa reconstit par Virges Armes). Les autres broignes : pas de sources absolues, des iconos dont l'interprétations est difficile (et ne pas se fier à VLD).

La lorica squamata, possible, mais des représentations effectives mais à prendre avec de grosses pincettes vu l'admiration délirantes des francs du Xième pour l'Antiquité, l'armure d'écaille est sujette à la même caution que le morion. Je suis moi même à la recherche de sources pour ce type de protection mais pour le milieu du XI. (et cette possibilité a aussi été soulevée pour Odon). Globalement ça serait quand même assez typé sud ou est.

La lamellaire, il y a des pièces à Birka mais c'est beaucoup plus Nord ou Est ou Sud.
walfroy_

dim. déc. 30, 2007 3:42 pm

Image

Voilà, l'image n'est très bonne, mais sur d'autres on peut se rendre bien compte qu'il s'agit d'une "broigne à écailles". Enfin pour autant que l'on puisse être sur.
Elle vient de la Bible de San Pedro de Roda et est daté de la deuxième moitier du XIième siècle.
Pour ce qui est du gambison, ton raisonnement fonctionne dans les deux sens. En effet, rien ne permet d'affirmer non plus qu'il n'y en avait pas. Il faut toujours garder à l'esprit cette maxime d'un de mes professeurs d'archéo qui dit "qu'absence de preuves n'est pas preuves d'absences!" Je ne peux pas affirmer qu'il y en avait mais on ne peut pas dire non plus qu'il n'y en avait pas.
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berhthramm
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dim. déc. 30, 2007 3:52 pm

Walfroy, je ne vois pas avec certitude de broigne à écaille sur cette image.

Celui qui se fait planter ? J'y voit plutot des ronds que certains accréditeront comme des anneaux de mailles et d'autres comme des plaques (rondes) de broignes... Pourtant j'aimerais tant y voir des écailles, c'est pile poil la période et le lieu qui m'interesse.

Je sais bien qu'absence de preuve n'est pas preuve d'absence... mais quand preuve il y a on est sur qu'il n'y a pas absence.
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berhthramm
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dim. déc. 30, 2007 4:09 pm

et cette bible est conservé à la BNF mais je suis incapable de trouver quoi que ce soit avec Galica...
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Morcant
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On a déjà des formes de "gambison" à la période romaine : subarmalis au Haut Empire, Torachomachus à l'époque tardive et Peristidyon chez les Romains Orientaux aux VIe et VIIe siècles.
C'est à ce vêtement de protection que sont rattachées les ptéruges, ces bandes de cuir très souvent illustrées dans l'iconographie antique.

Je cite Damianus des Herculiani :
Extrait du "De rebus Bellicis"
Traduction d'Hélène Jouffroy (nouvelle traduction)
dans: "L'armée romaine de Dioclétien à Valentinien Ier". Actes du congrès de Lyon, sous la direction de Yann Le Bohec et catherine Wolff, Diffusion de Boccard, 2004.
facilement trouvable; très bon bouquin!)

"XV- Présentation du thoracomachus

Parmi toutes les inventions à usage militaire que les anciens dans leur prévoyance, ont élaborées pour la postérité, ils ont présenté, contre le poid et le frottement des armes, le thoracomachus, étonnament commode pour soulager le corps. Car ce type de vêtement confectionné en feutre, à la mesure et pour la protection de la poitrine humaine, a été conçu, sous l'inspiration de la crainte et avec une ingéniosité magistrale, à partir de laine douces; il évite d'abord quand on le revêt, que la cuirasse, la cote de maille ou leurs équivalent ne blesse les corps fragiles par les frottements dus aux poids, et permet d'autre part aux membres du combattant ainsi vêtu de supporter leurs épreuves grâce à un tel allégement, au milieu des dangers de la guerre et du mauvais temps. Et pour éviter que le même thoracomachus, fouetté par la pluie, n'impose à son porteur une charge alourdie, il conviendra d'en revêtir la surface de peaux de Lybie (du cuir...) bien façonnée à la mesure de ce même thoracomachus. Quand donc, comme nous l'avons, il aura passé ce thoracomachus - que tire son nom de l'expression grecque désignant la protection du corps - quand en outre il aura mis des "soques", c'est à dire des chaussures, et des jambières ferrés, coiffé le casque, serré à son coté le bouclier ou le glaive, et qu'il tiendre bien en main ses lances, le soldat sera tout armé pour affronter le combat d'infanterie."
Le reste du sujet (avec d'autres sources, icono, et reconstitutions) ici :
http://111935.aceboard.fr/111935-529-17 ... rmalis.htm

On a un autre texte qui mentionne la nécessité de porter cette protection sous la lorica hamata, l'auteur déplorant le fait que nombre de soldats ne le fasse pas pour gagner en poids mais perdant ainsi beaucoup en protection.

Par contre pas de notions de ce genre de protection portée au combat sans lorica par dessus.


Un autre parallèle : chez les Irlandais du Haut Moyen Age, les protections du genre aketon sont avérées, du moins d'après ce que j'en sais.

Par exemple ici sur les guerriers de la croix de Muiredach, Xe siècle :
Image
Il s'agit d'une déclinaison "rembourrée" de la veste irlandaise, la ionar.

Image
Cette pierre picte montre aussi des guerriers qui pourraient très bien porter ce genre de protection.
http://img516.imageshack.us/img516/5214/4bfd9.jpg
"O niurt Ambrois ri Frangc ocus Brethan Letha."
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Berhthramm a tout dit...
J'ai franchement de gros gros doute sur la lorica squamata (idem pour le morion). Sur-représentée sur l'icono franque carolingienne, c'est tout de même étrange qu'elle n'ai laissé aucune trace archéo.
Pour ma part, j'y vois plutôt une volonté de se rattacher à une tradition romaine impériale.

Donc plutôt broigne d'écailles style Charavine.
Hiberno-Norvégien XIeme.


Compagnon de la Branche-Rouge.





<img src="http://www.branche-rouge.org/liens/BR_B ... ge_preview" alt="http://www.branche-rouge.org/liens/BR_B ... ge_preview" style="border:0" />





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Morcant
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lun. déc. 31, 2007 2:17 am

J'ai franchement de gros gros doute sur la lorica squamata (idem pour le morion). Sur-représentée sur l'icono franque carolingienne, c'est tout de même étrange qu'elle n'ai laissé aucune trace archéo.
Pour ma part, j'y vois plutôt une volonté de se rattacher à une tradition romaine impériale.
Qui plus est des iconos romaines très similaires se retrouvent dès le IIIe siècle, et pour les casques pseudo-morions qui sont plus ou moins inspirés des casques attiques grecs ça sent déjà à l'époque la convention artistique.

Par exemple : mosaïque de Dura Europos, IIIe siècle :
Image
http://img516.imageshack.us/img516/5214/4bfd9.jpg
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walfroy_

lun. déc. 31, 2007 4:00 am

Le personnage de gauche sur l'image porte ce qui doit être une cotte de maille. Sur une autre image que je dois scanner avant de mettre en ligne, on peut voir un camail semblable sur la tête. Maintenant il est vrai que sur des iconos de ce genre il est difficile de savoir quoi est quoi. C'est de l'interprétation. Cela pourrait être effectivement des plaques, mais là il faudrait les originaux et encore!
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berhthramm
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lun. déc. 31, 2007 4:28 am

walfroy a dit : Le personnage de gauche sur l'image porte ce qui doit être une cotte de maille. Sur une autre image que je dois scanner avant de mettre en ligne, on peut voir un camail semblable sur la tête. Maintenant il est vrai que sur des iconos de ce genre il est difficile de savoir quoi est quoi. C'est de l'interprétation. Cela pourrait être effectivement des plaques, mais là il faudrait les originaux et encore!
Oui pour celui-là pas de soucis, j'y vois bien aussi une cotte de maille, pour celui qui se fait planter, peut-être plutot une broigne à plaque (mais des plaques rondes c'est assez inepte comme concept de protection (pas grand rendement de protection pour une même quantité de métal que des plaques carrées ou rectangles à peu de chose prés)... ou alors effectivement des écailles mais interprétations difficiles, il y a quelques pièces sculptés qui vont dans le sens des broignes d'écailles mais elles aussi sujettes à caution : rerésentent soit des perso à connotation sarrasine ou méditéraneenne, soit d'interprétation difficile, soit plus tardives que le XIième (elles sont XII).


Pour moi la réponse sensée à la question initiale s'orienterait plus vers une broigne à plaque type Charavines d'autant que c'est quand même trés peu bien refait, les documents dessus sont pourtant disponibles (bon y a pas profusion non plus) et les interprétations peuvent être multiples et assez sympa (rien que pour le système de rembourrage et le système d'entrée)...
liudolf
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lun. déc. 31, 2007 4:50 am

Image
Vita de saint Aubin, XIème siècle. Il y a bien un vêtement épais qui dépasse de la cotte de mailles, l'épaisseur est visible sur la manche gauche.
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