Ok, ça marche
Tout d'abord, la bière médiévale comporte plusieurs différences, dont deux principales.
La première se situe au niveau de la dénomination même de bière.
La plupart des sources que j'ai sont anglaises (Honte à moi! Mais je suis à 1/4 goddon, ne l'oublions pas). Il y a
Ale et Bière. La gruytbier est une forme d'ale, mais flamande.
La différence entre l'Ale et la bière se situe au niveau du fait que pour l'Ale, le moût n'a pas bouilli avant de fermenter, alors qu'on fait bouillir le moût de la bière.
En France, la goudale suivait la fabrication de l'Ale anglaise (pas la marque actuelle, hein, mais le style). La raison d'une telle différence est simplement une conséquence de la recherche dans la conservation du breuvage. Un moût de bière est stérile grâce à l'ébullition, et seules les levures ensemencées se développeront.
Dans l'Ale, y'a de tout qui fermente, du bon (saccharomyces) comme du moins bon (bretanomyces) voire du pas bon du tout (bactéries lactiques ou butyriques, mouches, moustiques, poussières, fientes d'oiseau, assistant brasseur, armure, poulet, moteur de simca 1000 etc...)
La deuxième différence : gruyt vs. houblon.
La bière est houblonnée, l'Ale non, et la gruytbier comporte l'addition du gruyt. L'utilisation du gruyt est plus ancienne que nos chères inflorescences lupulinisées

La particularité du houblon, outre son amertume et son arôme (j'ai testé un houblonnage continu sur 60 min avec 5 gr de houblon chinook à 13% d'IBU ttes les 5 minutes, et ben l'arôme ça se sent!!) est sa capacité de désinfecter le moût. Encore une bonne chose pour renforcer la stabilté du produit fini dans le temps.
Le gruyt cherche les mêmes propiétés, voire, parfume la bière pour masquer son goût parfois hasardeux.
Voilà deux recettes : une Ale dont la recette de Robert Sibille date de 1282, et une gruytbier "modernisée" (c'est-à-dire buvable pour nous, pauvres hères du XXIème siècle)
Petite Bière (Weak Ale)
Malt blond : 2,3 kg
Flocons d'avoine : 0,7 kg
12,5 à 13 litres d'eau
1 paquet de levure
Danstar Windsor ale yeast
Faire bouillir de l'eau dans un chaudron bien propre et stériliser à l'eau bouillante pendant 15 min la cuve de brassage (sinon du chempro, mais c'est pas médiéval) La cuve de brassage doit avoir un couvercle et un système de vidange par le bas (tuyau et robinet), sinon il faudra transvaser le mash dans une cuve filtre.
Ecraser le grain à la meule en pierre, pas trop fin pour garder l'enveloppe des grains entière, et mélanger le grain à sec avec l'avoine.
Faire bouillir dans la cuve environ 2,5 à 3 litres d'eau. Retirer du feu. Ajouter le grain.
Verser dans le grain, d'une certaine hauteur, environ 2 litres supplémentaires d'eau bouillante (ceci afin de faire perdre un peu de châleur en augmentant l'évaporation... subtil...)
Mélanger au fourquet ou à la cuillère en bois, remettre le couvercle et laisser reposer 10 minutes (le grain gonfle).
Ajouter encore un litre d'eau bouillante, vérifier que le grain affleure l'eau, couvrir et laisser, sans remuer, 20 minutes.
Soulever le couvercle, remuer énergiquement en vérifiant une consistance de gruau épais. Refermer le couvercle et laisser au moins 1 heure et demie sans y toucher (allez faire un tour ou préparez un autre plat)
Revenu de vos pérégrinations, ajouter 3 litres d'eau bouillante en remuant et laisser reposer à couvert 25 minutes.
Finalement, ajouter l'eau bouillante restante (4 litres environ).
Stériliser une cuve de fermentation. Transférer le moût de la cuve-matière vers le fermenteur sans recirculation (garde un aspect trouble). Suivant la densité obtenue, l'écoulement sera plus ou moins rapide. A la fin de la récupération, fermer le fermenteur et laisser refroidir une nuit.
Le lendemain, ensemencer avec les levure reconstituées.
Laisser fermenter trois à quatre jours. L'Ale peut se boire fraîche (sortie de la cuve de fermentation, on l'appelle alors Young Ale), ou maturée en tonneau.
Pour donner un peu plus le goût du bois, on peut ajouter à partir d'un jour de fermentation des copeaux de chêne (ça se trouve dans le commerce pour vieillir le vin) à raison d'environ 700 gr. de copeaux infusés dans 250 ml d'eau bouillante. Si le goût est trop prononcé, il suffit de jeter la première eau (couleur thé foncé) et remettre de l'eau bouillante pour laisser infuser une deuxième fois. Laisser refroidir l'infusion de chêne avant de la mélanger à l'Ale (vous risquez de tuer les levures si c'est trop chaud)
Recommandations : le choix des levures n'est pas innocent, ce sont celles qui s'adaptent le mieux à ce genre de recettes.
Les flocons de chêne, c'est pas obligatoire. C'est pour donner le goût d'une ale brassée en tonneau, c'est tout...
Je conseille fortement de ne pas faire ce genre de recette, et surtout en utilisant cette méthode, en été ou au soleil. Ce serait l'idéal pour perturber les levures et donc le produit fini.
Au final : l'Ale a un goût assez fort de malt (cf. ovomaltine) et de pain (levures) La mesure discrète de la densité initiale et de la densité finale donnera son taux d'alcool. Bonne source de vitamines E

et bonheur assuré aux constipés chroniques pour ceux qui ne supportent pas les levures actives
Bon la deuxième recette demain, chuis mort
